L’affaire Volkswagen : c’est le pavé dans la mare des normes iso 9000 !
C’est le scandale :
Voici que le 1er groupe mondial d’automobile est pris la main dans le sac pour avoir équipé des modèles diesel VW et Audi, entre 2009 et 2015, d’un logiciel permettant de contourner les tests d’émission de certains polluants atmosphériques.
C’est l’Université de Virginie-Occidentale et l’ONG ICCT qui ont découvert le pot aux roses.
Mandaté au printemps 2014 pour étudier les énergies alternatives, le laboratoire n’a pu reproduire, en conditions de circulation réelle, les basses émissions avancées par Volkswagen, et le pot aux roses a été découvet.
Les normes ISO 9000 écornées par l’affaire VolksWagen
Personne le dit (car il ne fait surtout pas le dire !!!) mais ce qui est remis en cause par l’affaire VolksWagen, c’est la confiance. Or la confiance est à la base du système mise en place à l’aide des normes ISO 9000 (9001, 9002), dont le but réel est de réduire le poids de la puissance publique dans l’économie.
Elles ont été le fer de lance contre l’État et justifier la suppression d’un fonctionnaire sur deux voire plus. Car puisque les normes ISO9000 existaient, et que les entreprises étaient devenues toutes honnêtes et probes, plus besoin d’organismes de contrôle, de laboratoires publics, de service des domaines, de services douanes, etc.. et surtout, plus besoin de fonctionnaires.
Jusqu’à la charnière des années 1989/1990, le principe était que l’on ne pouvait pas "être juge et partie", notamment dans l’économie, et pour assurer la sécurité du consommateur, la charge de cette mission était confiée à l’État. Celui-ci, à l’aide de ses laboratoires, vérifiait les produits, et garantissait leur qualité, en regard des normes en vigueur et des lois.
Mais cette logique n’était pas du goût des grands capitalistes, qui voulaient se libérer de cette contrainte.
Avec les normes ISO 9000, les entreprises sont devenues juges et parties
Le but principal des normes ISO 9000 était, pour les "entreprises", c’est à dire les trusts, les monopoles, de s’affranchir de la tutelle de l’État sur le contrôle de leurs produits, et de remplacer son contrôle par de l’autocontrôle.
Car on était prétendument sorti du moyen âge en matière d’économie, l’entreprise était devenue moderne, et les grandes sociétés étant désormais « majeures » et « citoyennes ». Il suffisant de leur faire confiance et tout irait bien. La magouille et la dissimulation, qui avaient toujours été le propre du commerce ne faisaient prétendument plus partie de leurs pratiques commerciales. Les trusts étaient devenus honnêtes.
Les normes ISO 9000, Un jargon nouveau et des procédures complexes, pour donner le change.
Sous le prétexte de « moderniser les pratiques contractuelles", "d’accroître la compétitivité des fournisseurs" et d’obtenir "l’assurance de la satisfaction de ses besoins et de ses exigences", pour "optimiser la qualité", un jargon nouveau et des procédures complexes ont donc été mis en place.
Ce fut surtout l’envahissement de la paperasse, et l’alourdissement la charge de travail des salariés (sans emplois supplémentaires, bien entendu !).
Elles étaient sensées :
- 1- Créer des conditions favorables à l’implantation de la "qualité totale" en entreprise (La "qualité totale", jargon laissant entendre qu’avant la qualité n’était pas totale).
- 2- Inciter les fournisseurs à entreprendre aussi cette démarche de "qualité totale", (et, bien évidemment, écarter ceux qui seraient réticents à cette démarche).
- 3- Utiliser la formation pour inculquer aux salariés une véritable "culture de la qualité (Enfoncez-vous bien la "qualité" dans la tête : avant vous ne saviez pas travailler !)
- 4- Faire que le "chef d’entreprise" puisse mieux se consacrer à "ses clients" et à "sa créativité" (Comme si l’on avait vu un chef d’entreprise s’occuper d’autre chose que ses chiffres, son résultat financier et ses profits).
- 5- Laisser à l’ "automatismes des procédures" le soin de gérer le quotidien (en quelque sorte faire comme si l’honnêteté se gérait scientifiquement).
Pour cela on a vu arriver dans les entreprises :
- Des plans de contrôle : Document décrivant les dispositions spécifiques mises en œuvre pour effectuer le contrôle du produit ou du service considéré
- Des Audits "Qualité" : Processus méthodique, indépendant et documenté permettant d’obtenir des preuves d’audit et de les évaluer de manière objective pour déterminer dans quelles mesures les critères d’audit sont satisfaits.
- L’autocontrôle : Contrôle par l’exécutant lui-même du travail qu’il accompli, suivant des règles spécifiées, marquées surtout des doubles signatures, tout au long des processus de production, sur des documents normés, sensés assurer au client, sans que personne d’autre ne le contrôle, la qualité du produit.
Mais les normes ISO 9000 c’est pour "le monde des Bisounours", c’est à dire pour le naïf.
Tout le monde savait que, dans les entreprises, le grand sport c’est de contourner la norme, car elles n’ont pas toujours le personnel suffisant pour tout faire, et tout contrôler. Tout le monde a compris que l’important n’est pas que le produit soit de bonne qualité, mais que les documents qui l’accompagnent soient bien dotés des deux signatures que la norme oblige.
Car depuis les normes ISO 9000, il n’y a jamais eu autant de scandales : "Médiator", "implants mammaires", "maisons à 100 000€", etc...
Alors, Patatras ? C’est tout le dispositif qui menacerait de s’effondrer avec l’affaire Volkswagen ?
Rassurez-vous : le titre Volkswagen s’est effondré en Bourse, le PDG, qui n’était prétendument pas au courant de la magouille, est débarqué. Donc tout revient... dans l’ordre.
Alors, on efface tout et on recommence ?
Vous aurez noté qu’il a fallu l’expertise un "organisme extérieur", l’Université de Virginie-Occidentale et l’ONG ICCT pour que les magouilles soient révélées.
Qui révèlera les magouilles des grands groupes industriels dans notre pays ? Personne, ou alors par hasard,... si l’on ne renforce pas, ou mieux, si l’on en recrée pas en France les services de contrôles qui existaient autrefois, et que les politiques de "dégonflage du mammouth" ont cassé.
Moins d’État, moins de fonctionnaires, c’est moins de contrôles, et moins de sécurité pour le consommateur.
Car l’autocontrôle, ça ne marche pas !
L’autocontrôle, c’est comme le bonneteau : on n’arrive jamais à savoir où est passé le billet, et il se retrouve toujours dans la poche de celui qui manipule des godets !
Comme dit le vieil adage, on ne peut pas être juge et partie, surtout... lorsqu’il y a de l’argent à se faire. Les requins se mangent entre eux, et mangent les plus petits. Ils ne se domptent pas tout seuls ! Il faut les dompter ! Et c’est le rôle de l’État, avec ses fonctionnaires !
Merci à l’UL CGT Dieppe que j’ai intégralement recopié
Et le billet de l’UGICT CGT :
Ainsi donc grâce à quelques savantes lignes de code glissées parmi le million qui gère la cartographie moteur des diesels, Volkswagen a fait mentir ses voitures sur les particules polluantes qu’elles émettent. La révélation du scandale Volkswagen a provoqué un séisme de forte magnitude, et comme tel, il faut s’attendre à de nombreuses répliques.
D’abord comment ne pas penser aux dizaines de milliers d’ouvriers, techniciens, ingénieurs et cadres en bureaux d’études, en fabrication comme dans les réseaux des marques dont le groupe allemand est propriétaire. Ce sont eux qui paieront la note, dès lors que s’infléchira la courbe des ventes ou que la firme sera condamnée à verser des amendes qu’on imagine « Kolosalle ». S’ils ne sont pas invités à partager les richesses qu’ils créent, ils seront convoqués pour mutualiser les pertes.
« Cette affaire VW ne doit pas être instrumentalisée contre les salariés de la filière automobile et l’alibi à de nouvelles vagues de restructurations », a prévenu la CGT Métallurgie qui « condamne fermement ces stratégies. Ce n’est ni aux salariés, ni aux sous-traitants d’en payer les répercussions. VW, notamment en trichant, a dégagé des milliards d’euros de bénéfices ces dernières années. »
Au-delà du groupe, et notamment dans notre pays, les salariés de l’automobile ne sont pas tranquilles à l’annonce de ce scandale. Parce que rien n’interdit de penser que les mêmes procédés ou d’autres sont régulièrement employés pour passer sous les fourches caudines des normes ou bien pour gagner quelques décimales de marges. « Comme de nombreux industriels, VW a raisonné au moindre coût, préférant frauder (pour conforter ses marges et ses actionnaires) que de développer de nouvelles motorisations » a dénoncé la fédération CGT de la métallurgie la semaine dernière. « Chaque jour dans toutes les entreprises de l’automobile des ingénieurs, des cadres, des techniciens et ouvriers font évoluer par leur travail des technologies qui lient mobilité et environnement. Ces innovations sont souvent retardées ou abandonnées par les directions pour des questions de rentabilité.
C’est en ce sens que la CGT métallurgie réclame le renforcement du pouvoir d’intervention des salariés notamment pour que ces nouvelles technologies sortent plus rapidement. » Des droits d’intervention renforcés, mais aussi la reconnaissance comme le réclame l’Ugict d’un véritable statut pour les lanceurs d’alerte. Il n’aura échappé à personne que dans cette affaire, c’est à des ingénieurs et cadres qu’on a fait faire le sale boulot qui ruine la réputation de la marque et de celles qui lui sont associées.
Favoriser le droit d’alerte, de propositions alternatives aux choix stratégiques, consolidant la citoyenneté dans l’entreprise et l’exercice des libertés syndicales est à l’évidence plus que jamais indispensable. Faute de cela, on risque de nouveaux scandales et catastrophes industrielles, écologiques, humaines.
Publié le lundi, 28 septembre 2015 dans Billets de la semaine