PLFSS 2024 : Austérité à tous les étages
Les Lois de Financements de la Sécurité Sociale issues du Plan Juppé de 1996 ont toujours eu comme objectifs la rationalisation et l’austérité dans une logique de financiarisation de la Sécurité Sociale et ce PLFSS 2024 n’y déroge pas. Avec un ONDAM (Objectif National de Dépenses d’Assurance Maladie) qui augmente seulement de 3,2% alors que l’inflation a été évaluée à 5,8% en août dernier et que les établissements publics sont déjà dans l’asphyxie, ce PLFSS est annonciateur d’une situation catastrophique dans le champ de la santé.
Les victimes seront un fois de plus les malades avec une attaque sans précédent contre les arrêts de travail et un accès aux soins toujours plus dégradé.
Austérité budgétaire : c’est au malade de payer car il est responsable !
Le gouvernement continue à légitimer sa politique d’austérité en rendant les malades responsables de la dégradation de la situation financière du système. Ainsi en 2021, il a instauré un « forfait urgences » sous prétexte qu’il fallait responsabiliser les patients qui allaient aux urgences pour des problèmes de santé qui n’en relevaient pas. C’est la même logique qui sous-tend ce PLFSS à travers plusieurs mesures où la suspicion d’abus (les arrêts maladie) ou de mauvaises pratiques (« stocks de médicaments », urgences dentaires) est mis en avant. Cette responsabilisation des malades n’a qu’un objectif leur faire payer une politique libérale qui profite au patronat, aux assurances et établissements privés ainsi qu’aux laboratoires pharmaceutiques qui veulent continuer à s’engraisser
Attention ! même si les augmentations des franchises médicales ne sont pas présentes dans ce PLFSS, elles ne sont pas pour autant abandonnées par le gouvernement qui selon l’AEF veut les faire passer avec des modifications réglementaires dans un second temps : « Si le doublement des franchises médicales sur les médicaments et les consultations des médecins, qui devaient rapporter à peu près cette somme, n’est pour l’instant pas inscrit au PLFSS, il reste à l’ordre du jour, et pourrait être mis en œuvre « par voie réglementaire » indique le cabinet d’Aurélien Rousseau, Ministre de la Santé »
Les arrêts maladies dans le viseur
L’article 27 du PLFSS acte une attaque sans précédent en donnant la main au médecin contrôleur de l’employeur pour saisir la Sécurité sociale et suspendre les indemnités journalières. Outre le fait d’accentuer la pression sur les professionnels de santé afin qu’ils ne prescrivent plus d’arrêts maladie le gouvernement à travers cet article s’attaque aux fondamentaux de la Sécurité sociale.
C’est l’indépendance même de la Sécurité sociale qui se voit remise en question puisque ce ne seront plus ses médecins conseils de la sécu qui évalueront si les arrêts maladies sont justifiés ou non mais les médecins diligentés par l’employeur.
Ce sont les médecins des employeurs qui effectueront les contrôles et qui sous 72 heures remettront leurs conclusions à la Sécurité sociale.
A partir du moment où le médecin employeur indiquera dans ses conclusions que l’arrêt de travail n’est pas justifié, les services administratifs de la Sécurité sociale devront suspendre les indemnités journalières.
Plus grave : « dans le cas où le médecin diligenté par l’employeur a estimé que l’arrêt de travail est justifié pour une durée inférieure à celle fixée par le médecin prescripteur, la suspension prend effet à l’échéance de la durée retenue par le médecin diligenté par l’employeur ». article 27 . Les malades devront alors rembourser les indemnités journalières pour les périodes d’arrêt estimées non justifiées par le médecin de l’employeur, ce qui va engendrer des situations de grandes précarités.
Cet article met les arrêts maladies et leur indemnisation sous contrôle du patronat.
Un premier pas a été franchi avec l’ANI AT/MP du mois de juin dernier qui lui donnait déjà à travers la création d’un conseil d’administration tout pouvoir sur les accidents de travail et les maladies professionnelles. C’est un pas de plus qui rejoint la recommandation de la Cour des Comptes qui dans son rapport sur la Sécurité sociale 2022 préconise la création d’une branche unifiée pour le versement des indemnités journalières maladie et AT/MP mais dissociée de la branche maladie réduite à la seule prise en charge des « frais de santé ».
Comme nous l’avons déjà écrit, une telle réforme aurait pour conséquences de faire disparaître la question de la sous déclaration des AT, de laisser le libre champ au patronat sur l’ensemble des arrêts de travail et de dissocier définitivement la question de la prise en charge de la santé (frais de santé, accès aux soins) de la question de la santé au travail.
La suite de l’analyse dans le document ci-joint :