jeudi 28 mars 2024

Contre la casse du service public défendons ensemble « une justice pour toutes et tous » : mobilisation nationale le 12 décembre

mardi 11 décembre 2018

Le projet de loi de programmation 2018 – 2022 pour la Justice, adopté en première lecture au Sénat, est actuellement en cours d’examen devant l’Assemblée nationale.

Compte tenu des travaux en commission et des débats en séance, qui aboutissent à l’effacement systématique des modifications apportées par le Sénat, une éventuelle adoption du texte ne pourrait déboucher que sur la réunion prochaine d’une commission mixte paritaire en application de l’article 45 de la Constitution.

Derrière les éléments de langage creux sur la « modernisation », ce texte entérine en l’état une dégradation des conditions dans lesquelles la justice est rendue en France. Uniquement attaché à maintenir un haut niveau de productivité sans avoir à donner à la justice les moyens nécessaires à son bon fonctionnement, le gouvernement entend sacrifier la garantie des libertés, la qualité du débat judiciaire et l’accès de toutes et tous à une justice qu’il ne voit que comme une dépense à réduire.

Depuis un an, le gouvernement et la ministre de la Justice refusent de prendre en compte l’avis des professionnels de terrain (magistrats, avocats, personnels de la PJJ, greffier.e.s et personnels administratifs, services d’insertion et de probation, etc) et pratique la politique du rouleau compresseur en passant systématiquement en force.

Le sommet fut atteint la semaine dernière, lorsque la ministre fit voter par surprise et dans l’improvisation la plus totale rien de moins que l’habilitation à réformer l’ensemble de la justice pénale des enfants et adolescents par voie d’ordonnances comme s’il s’agissait d’un sujet anodin, qui ne méritait ni consultation des professionnels, ni débat parlementaire.

Ce dernier événement démontre le mépris dans lequel sont tenus les professionnel les de la justice qui, bien que rejoints dans leurs analyses par des institutions telles que le Défenseur des droits et la Commission nationale consultative des droits de l’homme, se voient répondre par la ministre qu’ils et elles ne connaissent pas suffisamment leur métier pour percevoir à quel point son projet est formidable.

Alors que les débats ont recommencé hier à l’Assemblée nationale, une nouvelle fois, dans la totale opacité et l’absence de dialogue réel et sincère ayant caractérisé la présentation de ce texte, un amendement présenté par le Groupe "la République en marche" vise à supprimer les greffes des Conseils des Prud’hommes lorsque ceux-ci ont leur siège dans la même commune que le tribunal judiciaire ou l’une de ses chambres détachées. Une telle mesure conduirait à priver cette juridiction particulière car composée de juges non professionnels d’un outil incontournable et indispensable à son fonctionnement. Elle traduit la volonté des pouvoirs publics de supprimer à terme cette juridiction.

Nos organisations manifestent depuis l’origine leur opposition à un projet qui dégrade considérablement le service public de la justice, au mépris des justiciables et des personnels, et dénoncent notamment :

 Un projet qui entend regrouper et mutualiser, actant la disparition des tribunaux d’instance, seule véritable justice de proximité ; qui crée une « plate forme » nationale de traitement des injonctions de payer, par voie intégralement dématérialisée et qui ouvre la porte à la dévitalisation de certaines juridictions par la possibilité de faire varier leurs compétences d’un ressort à l’autre, au détriment de la lisibilité, de l’accessibilité de la justice et de la qualité du service rendu

 Un projet qui entend éloigner les justiciables les plus modestes des instances de justice en étendant l’obligation de représentation comme pour le contentieux des élections professionnelles, la dématérialisation de la saisine malgré la fracture numérique ou en rétablissant de droit de timbre

 La privatisation du service public par le recours à des services privés en ligne pour les prestations d’aide à la résolution amiable des litiges, qui pourront se fonder sur un traitement algorithmique sans garantie sur la protection des données personnelles ;

 L’hypocrisie d’un projet qui prétend réduire le recours à l’enfermement alors qu’il renforce en fait la place de l’emprisonnement au coeur du droit des peines en réduisant les possibilités d’aménagement, en facilitant le prononcé de mandats de dépôt, en créant une peine de détention à domicile sous surveillance électronique réduite à un pur pistage sans accompagnement, et en augmentant le recours aux centre éducatifs fermés pour les mineurs ;

 Le recul sans précédent du contrôle de l’autorité judiciaire sur le travail policier, la marginalisation continue du juge d’instruction dans le but – recherché depuis longtemps – de le supprimer à terme, la régression du débat judiciaire, du principe de la contradiction, des droits de la défense et de manière générale des garanties de la procédure pénale ;

Depuis le début, plutôt que prendre le temps d’écouter les femmes et les hommes concourent à la justice ou la côtoient, la garde des Sceaux n’a cessé d’esquiver la discussion et de nous renvoyer à nos prétendus corporatismes ou ignorance. Ce projet de loi constitue un désengagement massif de l’état dans le service public de la justice. Il accentue encore l’abandon des quartiers populaires et des territoires ruraux ou ultrapériphériques.

Nos organisations professionnelles et syndicales sont déterminées à défendre une justice de qualité, accessible, égale pour tous et protectrice des libertés. Nous appelons l’ensemble des professionnels de la justice et les associations œuvrant pour l’accès aux droits à multiplier sans attendre les mobilisations et les résistances pour s’opposer au projet de réforme jusqu’à son retrait pur et simple.

Retrouvons nous, uni-es toutes et tous ensemble, professionnel-les de justice et justiciables, le 12 décembre 2018, dans le cadre d’une journée "Justice pour tous", dans le cadre de rassemblements et d’événements, pour affirmer notre opposition à ce projet et notre revendication d’un service public de la justice au service de la population !

Le 21 novembre, La CGT a été reçue par la Direction des services judiciaires sur la question du transfert des TASS et TCI. Nous avons, à cette occasion fait part de notre inquiétude sur d’autres aspects du projet de loi se rapportant plus spécifiquement au droit du travail :

La représentation obligatoire, en appel, devant le pôle social du TGI (regroupant TASS/TCI) ce qui représenterait un coût conséquent que beaucoup ne pourraient pas assumer, d’autant plus que les justiciables dans ce type de contentieux sont un public souvent en grande difficulté financière, psychologique, sanitaire et sociale. Les tribunaux gérant les contentieux de la sécurité sociale sont déjà critiquables quant aux pauvres moyens qui leur sont attribués. Ces juridictions dont l’enjeu est majeur pour les justiciables seraient encore moins accessibles.
La représentation obligatoire pour le contentieux des élections professionnelles. Ainsi, un employeur qui contesterait la désignation d’un délégué syndical : si le syndicat n’a pas les moyens de payer les honoraires d’un avocat, il ne pourra pas présenter sa défense devant le juge. Les seuls arguments présentés au juge seraient donc ceux de l’employeur. Les dégâts pour la représentation syndicale seraient désastreux. Jusqu’à présent ce contentieux fonctionne très bien sans représentation obligatoire, les syndicalistes étant à même de défendre « leur » dossier. Le Gouvernement voudrait encourager les employeurs à multiplier les contentieux, sachant que la majorité des syndicats ne pourraient pas suivre et nombre de désignation serait ainsi invalidée, il ne s’y prendrait pas autrement.
La suppression des greffes des Conseils de Prud’hommes, « Lorsqu’un conseil de prud’hommes a son siège dans la même commune que le tribunal judiciaire ou l’une de ses chambres de proximité, le greffe du tribunal judiciaire assure les fonctions de greffe du conseil de prud’hommes » (amendement 147 de La République En Marche).

À terme c’est donc la disparition des greffes spécifiques à la juridiction du travail (le greffe du TGI deviendrait en même temps le greffe du CPH). Dans cette juridiction, où les juges ne sont pas des professionnels du droit, le rôle du greffe est particulièrement précieux. N’en doutons pas, c’est une mesure de plus qui peut légitimement nous inquiéter sur la volonté du Gouvernement de supprimer les Conseils de Prud’hommes.















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