vendredi 29 mars 2024

Coût des Mutuelles et historique des déremboursements de la Sécu

vendredi 11 décembre 2015

De plus en plus de Français ne prennent plus de mutuelle à cause de leurs coûts élevés, or si leurs cotisations augmentent, c’est en grande partie à cause de deux raisons :

1- Vous payez une Taxe de 13,5% dans votre cotisation mutuelle !

L’une des causes récentes, c’est l’explosion des taxes qui servent à financer la CMU payée à 97% par les cotisations de mutuelle. C’est donc un impôt qui pèse quasi exclusivement sur les mutualistes.

> 1,75% de taxe en 2005,
> 13,27% de taxe en 2015,

La CGT milita pour que ce soit la Sécurité sociale qui prenne en charge le financement de la CMU. Elle combattit ce système, car elle estimait que cela entrait pleinement dans les missions de solidarité de celle-ci.

Rappel historique : Les mutuelles sont des entreprises à but non lucratif. Elles ne financent pas de dividendes, car elles n’ont pas d’actionnaires. En 1947, les mutuelles avaient toutes des cotisation proportionnelles aux salaires. Comme pour la Sécu, on payait selon ses moyens, et l’on recevait selon ses besoins.

Le désengagement de la Sécurité sociale ayant fait exploser les cotisations, et la concurrence avec les assurances entrainant le départ des adhérents les plus aisés, de plus en plus de mutuelles se sont mises à pratiquer la cotisation au forfait, pour conserver leurs adhérents. Dans ce cas la cotisation est fixe, identique pour tous les mutualiste, quelque soit le niveau du salaire. En conséquence la cotisation mutuelle s’est mise à peser plus lourdement sur les bas salaires que sur les hauts salaires. La conséquence fut le recul de la solidarité et de l’égalité.

2- L’effet des plans de déremboursement des médicaments sur les cotisations des mutuelles

L’autre raison, la plus ancienne, c’est le désengagement de la Sécurité sociale dans le remboursement des frais de santé :

> En 1950, tous les médicaments étaient remboursés à 95% par la Sécurité sociale, et 5% par les mutuelles.

> En 2015 il y a 3 catégories de médicaments :

— Des médicaments ne sont ni remboursés par la sécurité sociale, ni en conséquence par les mutuelles (qui sont des « complémentaires » de la Sécurité sociale). Ainsi de très nombreux médicaments, toujours prescrits par les médecins, sont entièrement à la charge du malade. Exemple : les médicaments contre l’arthrose, les hémorroïdes, les sirops contre la toux, etc
— Une grande partie des médicaments n’est remboursée qu’à 15%, ce qui laisse 85% du coût à la charge des mutuelles.
— Un nombre de plus en plus réduit de médicaments est remboursé à 35%, ce qui laisse 65% du coût à la charge des mutuelles.

D’où viennent ces accumulations de politiques successives de déremboursement ?

Depuis 1947, (création de la Sécu) le patronat ne cesse de lutter pour ce qu’il appelle « l’allègement des charges ». Dans les premières années, il prétendait que cela mettait les entreprises en difficulté, alors que les « 30 glorieuses » furent marquée par une explosion de la croissance. Puis, à partir du début des années 1970, les patrons commencèrent à prétendre que cela les empêchait d’embaucher.

Au fil des ans, sous prétexte de la lutte contre le chômage, ils ont obtenu la baisse régulière de leurs contributions, appelées aussi cotisations patronales — ce que les patrons et les médias appellent « charges » —, et ont obtenu de nombreuses exonéraitons de cotisations. Cela n’a cessé de réduire les ressources de la Sécurité sociale, d’où l’invention du « trou de la Sécu », qui à chaque fois provoque de nouvelles baisses de prestations.

En 1947, les cotisations patronales étaient le double de celles sur les salariés.

En 2014, pour les salaires au niveau du SMIC, l’exonération est totale pour les entreprises de moins de 20 salariés, et quasi totale pour les entreprises de plus de 20 salariés. Elle est dégressive pour les salaires entre 1 et 1,6 SMIC. Le coût des ces mesures était estimé à 19,9 milliards d’euros en 2012.

S’ajoutent à cela, entre autres :

  • des exonérations géographiques (zones de redynamisation urbaine, zones franches urbaines, zones de revitalisation rurale, mesures DOM). Le coût de ces mesures est estimé à 1, 4 milliard d’euros en 2012 ;
  • des exonérations sur des publics prioritaires (apprentis, stagiaires, salariés en contrat de professionnalisation ou d’accompagnement vers l’emploi, etc.). Le coût de ces mesures est estimé à 2,1 milliards d’euros en 2012 ;
  • des exonérations sur les services à la personne (aide à domicile employée par un particulier fragile, accueillants familiaux, etc.). Le coût de ces mesures était estimé à 1,3 milliard d’euros en 2012.

Sans parler de l’argent que retouche le patron de l’État en Crédit d’impôt, par le biais du CICE, au prétexte de lutter contre le chômage.

C’est la double/triple peine pour les salariés

D’un coté, comme il y a un plafonnement des cotisations patronales en dessous de certains seuils de salaires, le patronat s’en sert pour descendre les salaires au niveau du Smic, ou en tout cas les bloquer au dessous de 1,6 Smic. Or le Smic a été initialement créé pour payer des emplois sans aucune qualification. Aujourd’hui, le nombre de Bac+2 et plus payé au Smic est fréquent. Le licenciement des plus de 40 ans, et bien évidemment des séniors, permet de descendre leurs rémunérations, lors de la réembauche. Cela touche tous les salariés, même ceux qui ont, ou ont eu par le passé, un salaire supérieur à 1,6 Smic. Globalement, s’ajoutant au chômage, ce phénomène provoque la stagnation de la masse salariale, et donc des ressources de la Sécurité sociale.

De l’autre, il faut bien que quelqu’un le paye ce que le patronat ne paie plus : voilà l’origine des déremboursements de médicaments, des augmentations du forfait hospitalier, etc. que les mutuelles sont contraintes de prendre en charge,... et qu’elle répercutent sur leurs cotisations, car il faut bien qu’elles équilibrent leurs comptes (leurs ressources ne provenant que des cotisations, et pas des patrons).

Comme les plus pauvres (précaires, chômeurs, retraités, etc.) n’ont plus les moyens de « s’offrir le luxe » d’une mutuelle, dont les cotisations varient selon les prestations, de 50 à 100€, taxation des adhérents des mutuelles lors de la création de la CMU !

Retraités : le terrible effet attendu sur l’augmentation de leurs cotisations mutuelles, suite à la généralisation de la complémentaire santé pour les actifs en janvier 2016 (ANI 2013)

Au 1er janvier 2016, les entreprises sont obligées de mettre en place une complémentaire santé pour leurs salariés.

La conséquence évidente, c’est le départ des adhérents actifs des mutuelles, vers les « contrats groupes » de le leurs entreprises auxquels ils sont obligés d’adhérer (même s’il y aura des effets retards dans certains cas, mais tous les nouveaux embauchés y seront contraints). De plus, l’entreprise prend en charge une partie de la cotisation.

Le résultat pour les retraités, c’est qu’ils vont se retrouver dans des groupes de vieux, c’est à dire d’adhérents plus à risques que les plus jeunes, sur lesquels la mutuelle devra équilibrer ses coûts.

A l’évidence de fortes hausses de cotisations sont à attendre dans les prochaines années.

Repères (non exhaustifs) sur le recul régulier des remboursements de la Sécurité sociale (mais pas que), et celui de la protection sociale.

> 1967, ordonnances De Gaulle-Jeanneney : suppression des élections à la Sécurité sociale, remplacées par le "paritarisme", pour affaiblir la CGT (mais aussi pour dégrader la Sécurité sociale) ; réduction du remboursement des actes médicaux (70% au lieu de 80%) ; les médicaments sont remboursés à 70% ; les frais d’hospitalisations sont remboursés à 80%.
> 1971 : instauration du numérus clausus d’entrée en 2e année de médecine, fixé à 9000 places.
> 1975, premières exonérations de cotisations patronales sur les bas salaires.
> 1976 et 1977, plan Barre ; diminution du remboursement des médicaments (repérés par une vignette bleue) ;
> 1978 plan Veil : cotisation maladie payée par les retraités ; réduction du nombre de lit dans les hôpitaux ; aggravation du numérus clausus pour l’entrée en 2e année de médecine (sur le principe que moins de médecins, c’est moins de dépenses !)
> 1979 plan Barrot : gel du budget des hôpitaux ; hausses des cotisations des retraités,
> 1880 : baisse du taux de remboursement d’un grand nombre de médicaments (vignette bleue)
> 1981 plan Questiaux : cotisation maladie payée par les chômeurs
> 1982 plan Beregovoy : création du forfait hospitalier (20 francs, soit 3,05 euros), 1258 nouveaux médicaments voient leur remboursement réduit (vignette bleue).
> 1983 plan Beregovoy II : taxe sur alcool et tabac ; baisse à 6160 étudiants du numerus clausus pour l’entrée en 2e année de médecine, sous prétexte de "limiter les dépenses de santé" par la réduction du nombre de médecins
> 1985 plan Dufoix : hausse du ticket modérateur pour certains soins, Reclassement de 379 médicaments de 70 à 40%.
> 1986 plan Seguin : limitation du nombre d’affections remboursées à 100% ; hausse du forfait hospitalier ; impôt exceptionnel ; déremboursement des vitamines, à l’exception des vitamines D et B12.
> 1988 plan Evin : déremboursement de certains médicaments ; baisse du remboursement des analyses.
> 1990 plan Durieux-Rocard : institution de la CSG (Contribution sociale généralisée).
> 1991 plan Bianco : augmentation du forfait hospitalier ; Déremboursement des anti-asthéniques et des fortifiants ; Baisse (de 20 à 25%) du prix de 4 spécialités coûteuses (Rocephine, Zocor, Lodales, Prozac) ; Campagne de culpabilisation des assurés sociaux, financée par la Cnamts et le Ministère de la Santé : "La sécu, c’est bien. En abuser, ça craint" ; Nouvelle baisse à 3500 étudiants du numérus clausus d’entrée en 2e année de médecine, sous prétexte de "limiter les dépenses de santé" par la réduction du nombre de médecins (chiffre le plus bas chiffre de production de médecins entre 1971 et 2014) ;
> 1992, plan Teulade : nouvelle campagne médiatique de culpabilisation : "Un médicament, ça ne se prend pas à la légère"
> 1993 plan Veil : baisse du taux de remboursement des honoraires médicaux (de 75 à 70%), et des médicaments (de 70 à 65%) ; augmentation du forfait hospitalier ; augmentation de la CSG ; Déremboursement des médicaments à base d’oligoéléments et de magnésium.
> 1995 plan Juppé : lutte contre les prétendus abus et gaspillage ; Instauration de la loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS) ; les dépenses annuelles de la Sécu sont plafonnées par décret ;
> 1996 plan Barrot : création de la RDS, augmentation des taxes sur alcools et tabac
> 1998 plan Aubry : hausse de la CSG des salariés, des chômeurs, et des retraités ; plafonnement des dépenses de radiologie ; pénalisation des médecins ne respectant pas les quotas,
> 1999 : le nombre de personnes ne pouvant plus se soigner explosant, alors que la SQécurité sociale n’est plus en état de jouer son rôle universel, création de la CMU (Couverture Maladie Universelle), financée au départ par une taxe de 20% sur les mutuelles, et 80% par l’État. La CGT a milité pour que la CMU soit prise en charge par la Sécurité sociale, pour des raisons de solidarité nationale, ce qui fut refusé par le gouvernement. En 2015, la CMU est financée à 97% par les mutuelles, donc par les cotisations des seuls mutualistes.
> 2000 : baisse de remboursement pour 150 médicaments ; devant le risque de désertification médicale, remontée du numérus clausus à 7200.
> 2001 plan Guigou : déremboursement de nouveaux médicaments ; publication d’une liste de 835 médicaments jugés insuffisants que le gouvernement décide d’étudier au cas par cas..
> 2002 plan Matéï : déremboursement de 650 médicaments ; accélération des fermetures de lits et d’hôpitaux
> 2003 plan Matéï II : baisse de remboursement de 617 médicaments, de 65% à 30% ; déremboursement de 87 médicaments aux effets déclarés insuffisants ; Instauration d’un « forfait générique », permettant de faire rembourser sur la base d’un même montant les médicaments princeps et génériques (de fait on baisse le remboursement des médicaments princeps).
> 2004 : Création du médecin traitant ; création du dossier médical personnel ; réforme de la gouvernance de l’assurance maladie et du système de santé ; promotion des médicaments génériques ; Création du forfait d’1 euro
> 2005, Étatisation de la Sécu : Vote du budget de la sécu par les députés ; pluriannualité du financement ; obligation d’équilibre des régimes par le rapprochement recettes/dépenses ; contrainte objectifs/résultats.
> 2005 : le forfait hospitalier passe de 13 à 14 euros
> 2006 : le forfait hospitalier passe 15 euros ; baisse du taux de remboursement d’une nouvelle série de 156 médicaments : des expectorants, des fluidifiants bronchiques, des produits de phytothérapie, des oligoéléments et des médicaments contre les troubles digestifs. Pour 105 médicaments veinotoniques, le gouvernement crée un taux de remboursement provisoire de 15% (au lieu de 35 %) destiné à préparer leurdéremboursement total.
> 2007 : le forfait hospitalier passe 16 euros ; suppression du tiers payant pour les patients refusant un générique.
> 2008 : déremboursement total des médicaments phlébotoniques et des veinotoniques ; Création d’une franchise de 50 centimes par boîte de médicaments, et 2 euros par transport sanitaire, cette dernière étant plafonnée à 4 euros par jour. Pour l’ensemble des franchises, la participation de l’assuré est limitée à 50 euros par an.
> 2010 : le forfait hospitalier passe 18 euros ; diminution du taux de remboursement de 35 % à 15 % pour certains médicaments à service médical rendu (SMR) faible ; le numérus clause d’entrée en 2e année de médecine est remonté à 7400 (Mais la population française a augmenté de 10 millions par rapport à 1971, où il était de 9000).
> 2011 : création du "médicament de confort" non remboursé : 80 médicament sont déremboursés totalement : 18 myorelaxants, 17 vasodilatateurs, 8 produits contre l’ostéoporose, 7 anti rhumatismaux non stéroïdiens, 5 anti-hémorroïdaires en crème, 5 anti-arthrosiques et traitements des crampes, 3 anti parkinsoniens et 2 bains de bouche ; Baisse du taux de remboursement des médicaments "à service médical rendu modéré" (vignettes bleues) et des médicaments et préparations homéopathiques dans une fourchette de 25 à 30 %, contre 30 à 40 % précédemment.
> 2014 : suppresssion des vignettes sur les boîtes de médicaments, et leur remplacement par des codes barres, ce qui rend illisible le taux de remboursement du médicament par l’assuré social. Au 31 décembre, il y a 5,2 millions de bénéficiaires de la CMU, en hause de plus de 6% par rapport à l’année précédente.
> 2015 : nouvelle liste de médicaments déremboursés : antiarthrosiques d’action lente à base de glucosamine , les anti-inflammatoires non stéroïdiens à usage topique à base de kétoprofène, les spécialités à base de strontium ranélate agissant sur la minéralisation osseuse ainsi que les esters éthyliques d’acidesoméga-3

A noter : On pourrait faire la même étude sur l’évolution des allocations familiales. En 1946, le revenu salarié d’une famille de trois enfants (la moyenne dans les familles populaires) est constitué pour plus de la moitié par des allocations familiales. Les politiques successives ont réduit les allocations familiales à de l’annecdote, allant même jusqu’à les plafonner pour les plus hautes salaires en 2013.

Télécharger le repère revendicatif Sécurité sociale de la CGT

Cliquez pour en savoir plus sur les différents plans de restriction de la Sécurité Sociale sur le site de l’INA (mais ce ne sont que des vidéos d’interview de ministres et jamais de syndicalistes)

Historique de la politique du médicament en France (PDF)

En lien, l’interview en 1967, de M. Jeanneney, le ministre en charge d ela Sécurité sociale, qui rassure en expliquant aux télespectateurs qu’il n’y aura pas de conséquences très importantes sur les assurés sociaux. En réalité il s’agit d’écarter au forcept la CGT de la direction des Caisses de Sécurité sociale, car celle ci défend "becs et ongles" les intérêts des usagers. La grève de mai 1968 ne pourra pas remettre en cause cette réforme. En 2015, près de 55 ans cette réforme après, le bilan est désastreux. La santé des français se dégrade. Les populations les plus démunies n’ont plus accès aux soins. etc.

merci à l’UL CGT Dieppe pour ces repères















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