Ce n’est pas en multipliant les cadeaux aux patrons qu’on va résorber le chômage et mettre fin à la chute de l’emploi industriel
Les derniers chiffres de Pôle emploi font état d’une baisse sur trois mois consécutifs du nombre de demandeurs d’emploi dits de catégorie A, c’est-à-dire ceux qui n’ont pas travaillé, même pas une heure pendant le mois écoulé. Les effectifs de cette catégorie auront diminué de 110 000 depuis le mois de septembre. Cependant, 3,45 millions de personnes se trouvent encore dans cette catégorie au mois de novembre.
Le président de la République voit dans la baisse du nombre de demandeurs d’emploi de catégorie A, une « satisfaction du travail engagé ». Autrement dit, la « politique de l’offre » avec ses multiples cadeaux accordés aux entreprises (« pacte de responsabilité », CICE, « accords de compétitivité », loi El Khomri…) serait la bonne politique à suivre.
A l’appui de cette idée, M. Hollande ajoute : « Nous avons eu 240 000 créations nettes d’emplois depuis dix-sept mois ». Mais il omet deux faits majeurs : la chute de l’emploi industriel se poursuit et la précarité se développe.
En effet, chaque année des centaines de milliards d’euros d’aides sont accordés aux entreprises au nom de l’emploi et de la compétitivité. Et pourtant le compte n’y est pas. Ainsi, selon la Députée socialiste Karine Berger (France inter, 27 décembre 2016), les 40 milliards d’euros de dépensés chaque année au titre de pacte de compétitivité et de CICE n’ont pas donné de résultats à la hauteur des espérances. Selon elle, entre 100 000 et 150 000 auraient été créés grâce à ces mesures. Les chiffres avancés par la Députée sont optimistes eu égard aux rapports sur le CICE.Mais en admettant ces chiffres, le coût par emploi de ces mesures serait entre 270 000 et 400 000 par an. C’est trop cher payé pour des emplois dont une part importante est précaire.
La justification de la « politique de l’offre » promulguée par François Hollande et ses gouvernements risque de s’amplifier dans les prochains mois. Une publication récente de l’Insee intitulée « L’industrie manufacturière : une reprise de l’activité confirmée en 2015 » donne un avant-goût de cette nouvelle tactique. « En 2015, la production en volume de l’industrie manufacturière connaît un rebond en progressant de 1,7 %. Les flux internationaux s’intensifient et le déficit extérieur se réduit », peut-on lire dans cette publication.
Pourtant, à y regarder de plus près, en matière de production industrielle, tout comme en matière de chômage, le bilan n’est pas si brillant, au contraire.
1°) La production industrielle reste 8,5 % en-deçà de son niveau de 2007, soit avant la crise économique et financière de 2008. La situation est plus grave encore pour l’industrie manufacturière qui demeure 9 % en-dessous du niveau atteint en 2007.
2°) Le solde des échanges de produits manufacturés avec le reste du monde se dégrade : le rapport entre les exportations et les importations était de 97,6 % en 2007 ; il est de 97,2 % en 2015.
L’explication est simple : les capacités de production en France ne sont pas suffisantes faute d’investissement et d’emploi. Par conséquent, pour augmenter les exportations, il faut importer davantage (pièces détachées, etc.).
Cela explique la dégradation du solde des échanges extérieurs de produits manufacturés : on passe d’un déficit de 10 milliards d’euros en 2007 (393 milliards d’importations, 383 milliards d’exportations) à un déficit de 13 milliards en 2015 (459 milliards d’importations, 446 milliards d’exportations).
3°) Plus important de tout : hors intérim, l’emploi industriel continue sa chute : il baisse de 13 % entre 2007 et 2015 dans l’industrie et de 15 % dans l’industrie manufacturière.